Juriste - RetardVol.fr
08/07/2024
Le très récent Passenger Rights Protection Regulation (PRPR), est entré en vigueur en novembre 2023. Ce texte rédigé par le GACA, l’Autorité Générale de l’Aviation Civile du Royaume d'Arabie Saoudite, est un nouveau règlement sur les droits des passagers aériens en application en Arabie Saoudite.
Il n’est pas sans rappeler notre cher et bien aimé Règlement européen (CE) n°261/2004. Il est d’ailleurs admis de penser que ce nouveau Règlement Saoudien s’est profondément inspiré du nôtre, comme l’a fait le Règlement canadien DORS/2022-134 avant lui.
Pour autant, cette nouvelle réglementation va plus loin sur de nombreux points. Il est temps de décortiquer tout cela ensemble.
On ne saurait nier le fait que le l’Arabie Saoudite est devenue florissante ces derniers temps, et en particulier dans le domaine de l’aérien et de l’aéronautique. Certains s’amusent même à dénommer l’Arabie Saoudite comme le futur Eldorado du tourisme, ce qui est loin d’être erroné.
L’Arabie Saoudite a drastiquement vu son trafic aérien exploser au cours des dernières années. Il est à savoir que le nombre de passagers dans les aéroports d'Arabie saoudite a augmenté de 26 % en 2023 par rapport à 2022. Selon la GASTAT, l’Autorité générale des statistiques, le nombre de passagers dans les aéroports du royaume saoudien a atteint 112 millions en 2023, soit une augmentation de 26 % par rapport à 2022. Et c’est loin d’être fini !
Le Royaume peut compter sur des compagnies aériennes incroyablement performantes comme Saudia, Fly a Deal, Fly Nas et la petite nouvelle de la famille : Riyadh Air qui a dernièrement dévoilé ses nouveaux uniformes lors de la semaine de la Haute Couture à Paris.
La demande est haute et les investissements sont à la hauteur de celle-ci. L’Arabie Saoudite a délibérément choisi d’investir dans ses infrastructures aéroportuaires et dans le domaine de l’aérien, et si on peut affirmer une chose, c’est qu’elle voit très grand. On peut citer la construction de l'aéroport de Riyad, dans la capitale du pays, qui a pour ambition d’être le plus grand aéroport du monde.
Le Royaume devient donc le second pays de la région à réglementer dans ce domaine puisque Israël avait déjà, en 2012, été le premier pays de la Région Proche et Moyen-Orient à adopter la Loi d’Assistance et de Compensation des voyageurs aériens.
Contrairement aux lois existantes où les montants sont indiqués en euros ou dans la monnaie locale, le Royaume d’Arabie Saoudite a opté pour les Droits de Tirages Spéciaux (DTS), une monnaie virtuelle utilisée dans le secteur aérien depuis de nombreuses années. Rappelons qu’un DTS équivaut environ à 1€24.
Règlement Européen : tous les vols au départ de l’Union Européenne, ainsi que les vols au départ de pays tiers en direction de l’Union Européenne s’ils sont opérés par une compagnie européenne.
Règlementation saoudienne : cette nouvelle législation concerne tous les vols de toutes les compagnies depuis et vers l’Arabie Saoudite.
Règlement européen :
De 250€ à 600€ selon la distance du vol ;
Possibilité de réduire l’indemnisation de 50 % dans certaines circonstances.
En cas de retard supérieur à 5 heures, le passager peut demander le remboursement de son billet conformément à l’article 8 paragraphe 1.
Réglementation saoudienne : en cas de retard de 3 à 6 heures, l’indemnisation est de 50 xdr (~ 60€) et de 150 xdr pour tout retard supérieur à 6h (~ 180€)
En cas de retard supérieur à 2h, le passager peut demander le remboursement intégral de son billet. Au-delà de 3 heures d’attente dans l’avion, le passager peut demander à descendre et annuler son vol avec remboursement.
Règlement Européen : à partir d’un retard de 2 heures, il y a la prise en charge des frais de rafraîchissement, de restauration, et éventuellement de l’hôtel et du transport entre cet hôtel et l’aéroport si le vol est retardé jusqu’au lendemain ou remplacé par un vol le lendemain. Un moyen de communication doit être fourni aux passagers.
Réglementation saoudienne : les passagers auront aussi droit à une assistance pour Tarmac Delay au-delà de 3 heures.
Le Règlement européen (CE) n°261/2004 ne traite pas de la question des bagages tandis que la réglementation saoudienne prévoit jusqu'à 1560€ d'indemnisation en cas de perte de bagages par la compagnie aérienne ce qui est au-dessus de la compensation normale octroyée de manière générale en Europe sur la base du poids.
Règlement européen : Si un transporteur aérien effectif place un passager dans une classe inférieure à celle pour laquelle le billet a été acheté, il doit rembourser 30 % du prix du billet pour tous les vols de 1 500 kilomètres ou moins, 50 % du prix du billet pour tous les vols intracommunautaires de plus de 1 500 kilomètres, ainsi que pour tous les autres vols de 1 500 kilomètres à 3 500 kilomètres, ou 75 % du prix du billet pour les vols de + de 3500 kilomètres.
Réglementation saoudienne : Les passagers auront droit à une indemnisation équivalente à 200 % de la valeur du billet en cas de déclassement et s'ils décident d'annuler leur billet.
A priori, oui. La réglementation du Royaume couvre davantage de situations auxquelles les passagers peuvent être confrontés. Rappelons que le Règlement européen (CE) n°261/2004 ne mentionne pas les problèmes liés aux bagages. Ainsi, un passager souffrant de la perte ou de l'endommagement de ses bagages ne pouvait obtenir réparation grâce au Règlement (CE) n°261/2004 qui ne traite pas de ces sujets. En revanche, la réglementation saoudienne prévoit une indemnisation pour les passagers dont les bagages sont perdus par la compagnie aérienne. Le fait que cette nouvelle loi saoudienne s’applique aux bagages perdus est remarquable. Cela facilite grandement les réclamations des passagers concernés, qui n’auront pas besoin de se reposer sur la Convention de Montréal, dont la compensation est plafonnée à environ 1416 €.
La durée du retard pour requérir le remboursement du billet n’est également pas la même puisque seulement deux heures suffisent avec la réglementation saoudienne contrairement à notre cher Règlement qui exige que cinq heures se soient écoulés.
Concernant le champ d’application, la loi saoudienne est plus large puisqu’elle ne met pas en place de condition de nationalité de la compagnie aérienne contrairement au Règlement européen qui exige que la compagnie ait une licence communautaire lorsque le vol est au départ d’un pays tiers et à destination de l’Union européenne. Les passagers sont désormais protégés pour les vols entre l’Europe et l’Arabie Saoudite, et ce, peu importe la nationalité de la compagnie. C’est une grande avancée.
Avec la nouvelle loi de protection des passagers aériens saoudienne, il y a lieu d’espérer être déclassé ! En effet, l’indemnisation équivalente à 200 % de la valeur du billet en cas de déclassement, c’est largement plus que ce que le législateur européen propose (indemnisation entre 30% et 75% du prix du billet en fonction de la distance de vol).
La seule réserve qui peut être émise est sur les montants d’indemnisation. Tandis que du côté européen les indemnisations peuvent grimper jusqu’à 600€ en fonction de la distance de vol, du côté saoudien l’indemnisation varie d’environ 60 à 180€ au regard du temps de retard total.
Pour le moment, le Passenger Rights Protection Régulation (PRPR) n’est pas disponible à la lecture en occident mais on ne peut qu’imaginer qu’un tel pays ait mis en place une législation forte et protectrice des passagers en raison de sa supra-croissance dans le domaine aérien.
Espérons que la percée de nouvelles législations telles que celle saoudienne ou encore celle canadienne pousse l’Union Européenne a révisé sa propre législation qui commence à dater. En effet, celle-ci a fêté ses vingt ans cette année ! Il serait peut-être temps de s’inspirer des autres pour cette fois ?
Vol annulé ou retardé ? Jusqu'à 600€ d'indemnisation par passager. Frais au résultat uniquement.